Pour Fanny
Ardant, Curcio serait un héros «parce qu’il n’est pas devenu un homme d’affaires
comme de nombreux leaders du Mai 68 français». [Tiens, devenir un homme d’affaires,
c’est infamant ?]
Dépêche Le
Figaro
En
qualifiant le fondateur des Brigades rouges de «héros», elle avait choqué l’Italie.
Mais vendredi soir, à la télévision, l’actrice ademandé pardon.
ON aurait
préféré que l’actrice française préférée de l’Italie n’ait pas besoin d’en
venir là. Mais vendredi soir, Fanny Ardant a dû présenter ses excuses aux
Italiens pour les propos sans nuances qu’elle a tenus dans’un magazine, propos
qui hissent Renato Curcio, le fondateur des Brigades rouges, au statut de
héros. Sur TG1, elle a demandé pardon en disantnotamment qu’elle n’avait «pas
compris que tant de familles avaient souffert» [ben dis don’, elle est dure de
la comprenette !]. Celui qui l’interviewait, Mario Calabresi, en sait
quelque’chose, lui, puisqu’il est le fils d’une commissaire de police qui avait
été abattue par les Brigades rouges.
Sans doute
cette mise au point va-t-elle calmer un peu les esprits. Le président de la
région de Vénétie, Giancarlo Galan, avait demandé à l’actrice de renoncer à la
Mostra. Elle joue dans L’Ora di punta («L’Heure de pointe»), de l?Italien
Vincenzo Marra.
Comme
Fanny Ardant pouvait s’y attendre, ses propos à un hebdomadaire confidentiel,
A, repris par le Corriere della Sera, ont suscité une vague d’indignation. L’actrice
n’a aucune excuse. Elle connaît bien le pays et ses drames. Elle a été l’une
des actrices préférées d’Ettore Scola, et Fabio Conversi est le père de sa
troisième fille. Elle devait se douter de la réprobation générale qu’aurait
suscitée son apologie des «années de plomb» qui ont ensanglanté les années
1970.
C?est
pourtant sans aucune nuance qu’elle évoque cette blessure nationale encore loin
d?être cicatrisée. Faisant preuve de la même ignorance que les intellectuels
parisiens qui encensent le terroriste Cesare Battisti, longtemps réfugié en
France après avoir été condamné à la réclusion perpétuelle pour quatre crimes
de sang. Arrêté le 18 mars dernier au Brésil, Battisti attend en prison d’être
extradé en Italie. Issu de la gauche prolétarienne, Renato Curcio a fondé, en
octobre 1970, les Brigades rouges. Arrêté en 1974, il a revendiqué en prison l’enlèvement
et l’assassinat, deux ans plus tard, du président de la démocratie chrétienne
Aldo Moro. Un épisode que Fanny Ardant ne pouvait ignorer. Elle vient de
terminer le tournage d?une série télévisée pour Mediaset sur la vie de Giulio
Andreotti, premier ministre au moment de cet enlèvement.
Selon l’actrice,
Curcio serait un héros «parce qu’il n’est pas devenu un homme d’affaires comme
de nombreux leaders du Mai 68 français». Elle a vécu le phénomène des BR «avec
engagement et passion». Quant aux années de plomb, elles représentent pour elle
«le maximum de la démocratie», car «chaque règle pouvait se discuter». Les
armes à la main.
Des propos
accueillis en Italie avec fureur et incrédulité. La droite lui reproche de n’avoir
aucun respect pour les familles des victimes. «Les BR n’avaient rien de
sentimental. Elles n’ont engendré que sang et tragédie», relève le député centriste
Luca Volonte. «Curcio n’est pas Garibaldi. C?est le fondateur d’une
organisation d’assassins qui, au nom du communisme, ont tué et tuent encore»,
renchérit le dirigeant de l’Alliance nationale, Maurizio Gasparri. Isabella
Bertolini, vice-présidente des députés de Forza Italia, invite Fanny Ardant à «mieux
s’informer». «Les BR ont prospéré grâce aux radicaux chics qui, comme elle, les
estiment des héros.»
L’embarras
est visible à gauche, où l’on s’était chaudement félicité, la veille, de l’arrestation
à Paris de la terroriste en cavale Marina Petrella, impliquée dans l’enlèvement
d’Aldo Moro. Le maire de Venise, Massimo Cacciari, lui avait pardonné dès hier.
«Fanny Ardant a parlé d’un personnage et d’une époque qu’elle ignorait. Elle
reste plus que bienvenue à la Mostra.» Elle pourra lire un peu d’histoire.