Sujet: Fwd: Chronique d'espérance
De: Kae
Date: Tue, 18 Dec 2007 08:22:35 +0100
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Fwd: Chronique d'espérance
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Dérive
Jean-Louis Caccomo,  le 17 décembre 2007

Quand vient la lassitude et le découragement, je me demande parfois si les français ne vivent pas au-dessus de leurs moyens intellectuels. Ils veulent sans cesse arracher des augmentations de salaires en usant de méthodes collectives qui aboutissent à renchérir le prix des choses qu'ils consommeront par la suite. Ils revendiquent la démocratie mais sont prêts à couper la tête de ceux qui ne seront pas exactement d'accord avec eux.  Ils se définissent comme des animaux politiques mais ne sont pas toujours prêts à débattre selon les règles de respect et d'ouverture que le débat implique. Pour ne pas en être conscients, ils forment aujourd'hui une collectivité en dérive.

Car avant d'être financière, une faillite est toujours et d'abord morale. C'est pour avoir oublié que les droits sont toujours la contrepartie de devoirs que nous tirons collectivement sur la corde qui nous étrangle, subissant le chantage suicidaire de syndicats aveugles. Les Français ont guillotiné leur roi, mettant fin à une des dynasties régnantes les plus vieilles et les plus prestigieuses de l'histoire humaine qui avait porté la France au sommet de son rayonnement, au nom d'une révolution libératrice qui a rapidement dégénéré en une terreur jacobine sanglante qui a installé pour longtemps un Etat central aussi omnipotent qu'impotent. Ils ont tué ensuite Dieu et l'Eglise  pour s'affranchir des cadres trop stricts de la foi.  Ils ont enfin tué la démocratie elle-même, court-circuitant sans arrêt le verdict des urnes quand il dérange les minorités coalisés en corporatismes de toutes sortes. Alors qu'ils sont demandeurs de toujours plus d'Etat dans pratiquement tous les domaines de leur vie, les français n'ont de cesse d'empêcher les responsables politiques d'agir, ceux qui ont précisément pour mission de conduire l'Etat. On ne peut incessamment demander une chose et son contraire.

A force de saboter un à un les cadres fondamentaux de la cohésion sociale et de l'identité d'un peuple, nous vivons dans un pays en coup d'Etat permanent et en guerre civile larvée et récurrente. Au lieu de nous souder, chacun met de l'huile sur le feu. Les prix du pétrole grimpent, les marins pêcheurs bloquent les ports et brûlent des pneus. Quand ce n'est pas les routiers qui bloquent les routes, ce sont alors les transports publics qui prennent en otage la population impuissante. De leurs côtés, les étudiants en colère bloquent les campus ou les professeurs font la grève des examens.
La dislocation de la cohésion sociale et nationale, que la mascarade de « dialogue social » peut difficilement camoufler, est un signe patent d'un déclin dont la dimension économique n'est que la surface. Car ce déclin est culturel et moral : le rejet de toute forme d'autorité et de discipline (car en effet créer des richesses implique de travailler, ce qui ne va pas sans contraintes et la contrainte budgétaire est toujours la contrepartie d'un pouvoir d'achat) conduit à la médiocrité et à l'affaiblissement. Dans ce contexte, nous avons peur du changement, de l'inconnu, du monde, des autres, ce qui nous conduit à avoir peur de vivre tout simplement. De plus, chacun de nous est tenté de cultiver un comportement de prédateur vis-à-vis de notre propre pays, en cherchant de profiter de tous les avantages que peut offrir un système dont nous savons pourtant qu'il est à l'agonie. Au lieu de soigner le malade, on l'achève, au nom de la solidarité citoyenne !
Il ne suffit pas de dire « il y a de l'argent ! » comme le fait Besancenot en montrant du doigt les entreprises du CAC 40 qu'il recommande de nationaliser, suivant en cela les prescriptions éclairées de son mentor Chavez. Ces entreprises font précisément du bénéfice parce qu'elles ne sont pas gérées par l'Etat, et ce bénéfice a une fonction économique essentielle. Quand la régie Renault était une entreprise publique, elle était constamment sous perfusion, coûtant de l'argent au contribuable. Elle a commencé à faire des bénéfices lorsqu'elle est devenue une entreprise privée, payant sa part d'impôt sur le bénéfice (ce qui rapporte de l'argent à l'Etat). Il est arrivé pratiquement le sort inverse à l'entreprise BULL, qui était une entreprise bénéficiaire et en pointe avant de faire l'objet d'une nationalisation. Il faut être carrément idiot pour vouloir étrangler la poule aux œufs d'or : une fois nationalisée, les entreprises feront des pertes ; et les bénéfices s'évaporeront étant entendu que la richesse n'est pas un stock que l'on peut partager indéfiniment mais un flux qu'il faut susciter perpétuellement.

Le culte de l'Etat-Régulateur s'appuie dans le même temps sur un profond rejet de la nation au point qu'il apparait même choquant de demander aux ayants-droits ou à tous les candidats à la nationalité française de maîtriser la langue française et d'adhérer à ses principes constitutionnels. L'Etatisme a phagocyté la nation. Autrement dit, dans le même temps que les français réclament et multiplient des droits (opposables), ils nient et rejettent tous les devoirs que cela implique. Plus personne n'est prêt à se sacrifier pour la France, mais tout  le monde veut sa carte vitale, un logement gratuit fourni par l'Etat, des écoles, crèches et universités accessibles à tous sans frais, sans condition et sans sélection.
Sarkozy candidat avait su créer un élan prometteur de renouveau puisqu'il avait su parler de la France, et non des petits bobos catégoriels, car l'intérêt général ne saurait être la somme des intérêts catégoriels par nature contradictoires. Pour notre malheur, une fois devenu président, il risque de se lier les mains en retombant dans cet infernal piège qui consiste à se porter au secours des revendications corporatistes, lesquelles auront pour effet de briser le pays.