MARC MENNESSIER.
Publié le 26 juillet 2007 dans Le Figaro
Les attaques d'insectes augmentent la teneur de ces poisons
dans les récoltes.
COMME leur nom l'indique, les mycotoxines sont des poisons
sécrétés par des moisissures présentes dans certaines denrées alimentaires.
Responsables de cancers du foie, les aflatoxines, que l'on retrouve dans les
fruits secs ou les céréales, sont les plus dangereuses à la fois pour l'homme
et les animaux d'élevage. Elles sont heureusement bien contrôlées : « les
gestionnaires de silos savent quoi faire pour empêcher la prolifération des
champignons qui génèrent les aflatoxines : aération du silo, mélange des grains
et, certaines années, traitements chimiques », explique Pierre Galtier,
chercheur au laboratoire pharmacologie-toxicologie de l'Institut national de la
recherche agronomique (Inra) à Toulouse.
Il n'en va pas de même, en revanche, pour les fumonisines,
des mycotoxines moins virulentes que les précédentes mais plus difficiles à
maîtriser. « Leur présence dans les grains dépend uniquement de la climatologie
car elles sont produites par les fusarium, des moisissures qui colonisent la
plante en cours de végétation », poursuit Pierre Galtier. Espacement des
cultures de céréales dans la rotation, enfouissement des résidus de récoltes,
utilisation de variétés tolérantes aux fusarium, sont les moyens
traditionnellement utilisés par les agriculteurs pour combattre le fléau. Sans
oublier les traitements fongicides (du latin fongus, champignon) et
insecticides, qu'il convient toutefois d'appliquer au bon stade, ce qui n'est
pas toujours possible.
D'où l'intérêt des maïs Bt, génétiquement résistants aux
insectes parasites comme la sésamie ou la pyrale dont les larves, en creusant
des galeries dans la tige et l'épi, facilitent l'entrée du champignon dans la
plante et donc la contamination par les mycotoxines.
Principe de précaution
L'an dernier, l'Institut technique de la filière céréalière,
Arvalis, a comparé, sur treize parcelles d'essais, les teneurs en fumonisines
retrouvées dans des maïs OGM ou non OGM. Dans les situations à faible pression
d'insectes ravageurs la concentration en toxine était inférieure de 45 % dans
les maïs transgéniques par rapport aux maïs conventionnels : 0,6 milligramme
par kilo (mg/kg) de grain contre 1,1 mg/kg. Sur les parcelles fortement
parasitées, l'écart est encore plus significatif avec une teneur de 3,1 mg/kg
dans les maïs traditionnels contre seulement 1,3 mg/kg dans le maïs résistant
aux insectes, soit une réduction de 58 %.
Certes, ces teneurs sont toutes inférieures à la norme européenne de 4 mg/kg qui entrera en vigueur le 1er octobre prochain. Mais, pour Luc Esprit, le directeur de l'Association générale des producteurs de maïs (AGPM) : « Il est clair que les variétés Bt offrent une marge de sécurité supplémentaire dans les zones fortement infestées. A fortiori, si les conditions climatiques sont très humides comme c'est pour l'instant le cas cette année. » Par ailleurs, les premiers signes d'immunotoxicité apparaissent à partir de 5 mg/kg si le grain est régulièrement consommé. Or le principe de précaution doit aussi jouer vis-à-vis de ces poisons, fussent-ils d'origine naturelle.